Avec ce second opus, l’artiste britannique livre un récit déchirant et profond. Accompagnée d’une production avant gardiste, elle explore les affres de l’amour contrarié et change les paradigmes autour de la féminité.
Cela faisait 5 ans qu’on l’attendait après le très réussi LP1. La voici de retour, prenant les traits de Marie Madeleine. Derrière ce choix intriguant, il y la volonté de donner la parole à celle a qui on donne a très souvent prêté toutes sortes de représentations. Le morceau central de l’album lui ai dédié, et c’est sûrement le plus puissant. Il se concentre sur la puissance féminine, le travail d’une femme, la prérogative d’une femme, le moment ou une femme doit prendre conscience qu’elle doit être sa propre priorité (« A woman’s work / A woman’s prerogative / A woman’s time to embrace / She must put herself first »). Une nouvelle narration autour de la figure féminine par excellence est posé. Prostitué mais sainte, forte mais fragile, cette réalisation est à l’image de la compagne du messie, ambivalente.
Comme pour le titre en central, les autres morceaux relatent de manière très juste les sensations glaçantes ou réconfortantes provoqués par un amour. On passe de l’euphorie a l’épuisement, des déclarations aux reproches, avec au fil des titres une intensité constante et éprouvante. Cette mise en paroles admirable renforce d’autant plus la puissance de cet opus.
Dévote des arts de tout son corps et son âme, danseuse et chorégraphe, maitrisant les arts martiaux, la conception visuelle, le chant et la production musicale, on découvre au fil des morceaux et des clips qui les accompagnent l’étendu du talent de Tahliah Debrett Barnett. Prêtresse, guerrière ou peut être sorcière, Twigs s’offre dans tout les facettes de sa force et sa vulnérabilité.
À artiste complexe, album complexe. Produit essentiellement avec l’aide du talentueux Nicolas Jaar, les 9 titres sont autant de moment en flottement, spirituels comme “thousand eyes” en ouverture, provocateur dans “holy terrain” (feat. Future) ou tendre avec “mirrored heart”.
Un album qui ne nous laisse aucun choix mais d’admettre la maturité d’écriture, vocale et esthétique à seulement 31 ans de celle qui s’impose désormais comme une artiste contemporaine incontournable.
Mention spéciale pour le live conçu par l’artiste, un spectacle immersif et qui nous confirme que FKA Twigs est bien (comme l’un de ses titres l’indique) un “fallen alien”.
MAGDALENE – FKA Twigs, Young Turks, 2019