Déambulation aqueuse dans le ventre d’un géant.
Se rendre pour la première fois à la Base Sous-Marine est une expérience en soi. L’appréhension de cette structure datant de la Seconde Guerre Mondiale, au lourd passé historique, commence dès l’extérieur avec sa masse et ses volumes imposants. L’intérieur est un dédale de béton et d’eau, où la lumière naturelle est inexistante. Ce bâtiment avale le visiteur, le coupe de la vie extérieure et le déstabilise de tous ses sens. Et c’est dans cet autre univers qu’est exposé actuellement et avec justesse le travail numérique de Miguel Chevalier, inspiré par la faune et la flore des abysses.
A la suite du « cabinet de curiosités » plongé dans une obscurité profonde sont présentées huit œuvres à l’échelle du lieu, c’est-à-dire monumentales. Les fonds marins numériques de l’artiste projetés sur des surfaces de plusieurs mètres carrés en béton brut y trouvent parfaitement leur place.
Les formes colorées sans cesse mouvantes hypnotisent. Les sons mystérieux émis dans les salles gigantesques résonnent, font perdre les repères spatiaux. Les capteurs de mouvements qui permettent d’interagir directement avec les œuvres renforcent le sentiment d’absorption par une entité supérieure.
C’est un véritable monde parallèle qui est construit par l’artiste, dans lequel le visiteur n’est qu’un étranger, minuscule, perdu. Réel (du bâtiment) et virtuel (des œuvres) s’imbriquent avec fluidité pour mieux nous rappeler la petitesse et la fragilité de l’être humain face à l’immensité du monde aquatique.
Infos : Exposition « Digital Abysses » de Miguel Chevalier, jusqu’au 20 mai à la Base-Sous Marine
de Bordeaux
Emilie Baron
Crédit photo : Emma Derancy